Natation : plus vite grâce à l’IA
Comment identifier les réglages à effectuer pour rendre un nageur plus rapide ? Science et technologie ont longtemps été impuissantes à donner des réponses claires à l’entraîneur. Impossible en effet de reconstituer de manière automatique et précise le mouvement d’un nageur de crawl, par exemple, en le filmant : les éclaboussures et les membres qui masquent une partie du corps, rendent la tâche trop difficile. Heureusement depuis quelques années, la miniaturisation des accéléromètres, ces capteurs de mouvement, permet d'en équiper les nageurs. Sauf que quand ceux-ci vont très vite, les choses se corsent. C'est précisément sur cela que travaille Jérémie Boulanger, enseignant-chercheur de l’université, au centre de recherche en informatique, signal et automatique de Lille (Cristal ➊).
« L'une des questions que se posent les entraîneurs, raconte-t-il, est le rôle des 4 points-clés qui constituent le cycle du crawl au niveau des bras [lever du bras, pénétration dans l'eau, tirée et poussée]. Le nageur passe-t-il trop de temps dans les deux premières, qui ne le font pas avancer ? » Les exécute-t-il moins bien quand il veut aller vite ? Est-ce que le bras gauche commence son mouvement juste après que le bras droit a fini le sien, ou un peu avant, ou un peu après ?
Quand le nageur va relativement lentement, on distingue bien sur les données des capteurs les quatre étapes de sa nage. Mais quand il va vite, c’est impossible. C'est pourquoi Jérémie Boulanger recourt à l'intelligence artificielle pour que l'ordinateur apprenne à reconnaître automatiquement les étapes. Pour cela, il faut lui indiquer au préalable où les trouver dans les données. Un travail de patience effectué par des collègues spécialistes de natation, qui les notent scrupuleusement à partir des images filmées d’une caméra. Une fois celle-ci synchronisée avec les données enregistrées par les accéléromètres, l'ordinateur peut prendre le relais. Verdict ? Après un an d'annotations des données, l'intelligence artificielle commence à savoir identifier avec une bonne probabilité les différentes étapes du crawl.
La méthode étant donc en passe d’être validée, il va être désormais possible d'étudier toutes sortes de choses : se pencher sur d’autres nages comme le papillon, mais aussi comprendre le rôle du roulis du bassin ou des épaules, un phénomène qui n’aide pas à avancer mais qui est parfois présent, notamment chez les para-nageurs, etc. Ces études s'inscrivent d'ailleurs dans un projet plus vaste pour les JO 2024, le projet Neptune, qui s'intéresse à bien d’autres aspects comme la coulée du nageur et la vague qu’il crée. ■