Train : des impressions 3D à l'épreuve du feu
Des hangars immenses… Si la surface occupée par le train se remarque facilement dans les plans des villes, ce n’est pas seulement à cause des voies ferrées et des gares, mais aussi parce qu’il doit disposer de capacités de stockage considérables. En effet, un wagon ou plutôt une « voiture » dans le langage de la SNCF, est généralement utilisée pendant plusieurs décennies. Quand une pièce casse, mieux vaut l’avoir en stock, car souvent elle ne se fabrique plus. Ne pourrait-on pas en fabriquer certaines à la demande ? C'est le pari tenu par la start-up 4D Pioneers, avec l'aide des chercheurs d’un laboratoire de l’université, l'unité Matériaux et transformations (Umet).
Au-delà des éléments métalliques qui viennent en premier à l’esprit quand on pense à un train, les voitures d'aujourd'hui sont pleines de plastiques, depuis les sièges jusqu’aux toilettes, etc. Avec un évident danger d'incendie, auquel répondent des normes draconiennes en vigueur dans le ferroviaire. Résultat : les compagnies ferroviaires tiennent, comme à la prunelle de leurs yeux, à ces pièces qui ont passé les tests et qui sont en général très coûteuses.
Ancien ingénieur et docteur de Centrale Lille, chercheur dans un laboratoire de l’université, le LamCube, Nicolas Gay a fondé la start-up 4D Pioneers, spécialisée dans les machines et matériaux nécessaires à l'impression 3D. Il se dit qu'il y a une carte à jouer et s’adresse à un expert, Serge Bourbigot, de l’Umet. La collaboration est lancée et prendra notamment la forme d'une thèse Cifre➊, celle de Laura Geoffroy.
« Dans ce genre de problématique, explique Serge Bourbigot, il ne faut pas simplement trouver des matériaux qui résistent au feu, mais également comprendre très précisément les tests. Par exemple, dans l'un d'eux, le matériau est en position verticale, donc risque de goutter s'il n'a pas suffisamment de cohésion. » Les tests examinent si la flamme se propage vite, si le matériau libère beaucoup d’énergie, mais aussi la fumée produite. « Toute fumée est toxique, y compris votre barbecue, prévient Serge Bourbigot, notamment parce qu’il libère du monoxyde de carbone. L’enjeu est de ne pas générer des hypertoxiques, qui auraient des effets incapacitants sur les personnes fuyant l’incendie. »
Mais alors, comment fait-on pour que des matériaux ne brûlent pas ? « On utilise différents types de phénomènes, souvent combinés entre eux, détaille Serge Bourbigot. Le matériau relargue quelque chose qui empoisonne la flamme, ou l’étouffe via la génération d’une mousse, ou se transforme immédiatement en charbon, ou se refroidit quand on le chauffe (puits thermique). »
Mais encore faut-il que le matériau reste peu coûteux, ne bouche pas les buses des machines 3D, s’étale correctement, etc. C’est ce qu’a réussi à faire cette collaboration, formulant le matériau 4Tunata, d’ores et déjà vendu en granules sur le site de la start-up, qui a passé la norme « HL2 N1 » et pour lequel un brevet est en train d’être déposé. Récemment, et même si ce n’était pas requis par les tests, l’entreprise et le laboratoire ont vérifié, grâce à une deuxième thèse Cifre, celle de Roxane Baron, la bonne durabilité de ces matériaux. ■
➊ Convention industrielle de formation par la recherche (Cifre). Elle permet aux entreprises de bénéficier d'une aide financière pour recruter de jeunes doctorants sur un projet de recherche.